Caroline Janvier est rapporteure sur l’autonomie et le médico-social pour le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS). Entretien avec la députée de la deuxième circonscription du Loiret.
Le Ségur de la Santé a apporté une réponse aux personnels du secteur hospitalier. Ceux du médico-social, hors EHPAD, ont été oubliés alors que bon nombre d’entre-eux exercent les mêmes métiers auprès des personnes en situation de handicap. Que leur dites-vous ?
Caroline Janvier : Je comprends leur incompréhension, mais je leur dis de continuer de se mobiliser et que je serai attentif à ce qu’ils obtiennent bien une revalorisation. Avec plusieurs collègues nous avons saisi en ce sens par courrier le ministre Olivier Véran, qui s’est montré rassurant. Nous n’ignorons pas les situations que les professionnels vivent au quotidien au sein des services sociaux et médico-sociaux dans le champ du handicap, notamment les MAS. Un temps d’expertise complémentaire a été jugé nécessaire pour mettre en place ces revalorisations. Une première rencontre avec les partenaires sociaux de la fonction publique hospitalière a été organisée le 12 octobre sur ce sujet, dans l’optique d’aboutir dans les plus brefs délais. Des recommandations seront émises par Michel Lafourcade afin de guider l’action du gouvernement.
Quels seront les grands changements en 2021 pour le médico-social après l’adoption du PLFSS ?
C.J. : La 5e branche va permettre une plus grande visibilité de nos politiques liées à l’autonomie concernant les personnes en situation de handicap ou les personnes âgées. Elle doit travailler à des compensations plus individualisées, comme la PCH parentalité, et d’aborder à moyen terme des thématiques comme l’habitat inclusif. Le PLFSS 2021 a délimité le mode de gouvernance, avec la CNSA comme animateur territorial, et les premiers transferts de financement. Celle-ci devrait monter en charge progressivement. La transformation des MDPH en “maisons de l’autonomie” prend du temps et nous agissons en amont sur l’amélioration du service rendu et des systèmes d’informations. Le gouvernement investit également 100 millions d’euros dans l’accélération du déploiement de solutions adaptées.
Les politiques publiques viser à une société inclusive dans le domaine de l’éducation ou de l’habitat par exemple. Quelle est votre vision de cette société plus inclusive ?
C.J. : 51 milliards d’euros sont aujourd’hui dédiés aux personnes en situation de handicap. C’est un chiffre conséquent car la politique du handicap est élargie. Chacun – c’est-à-dire chaque ministère – doit en effet prendre sa part dans les dépenses afin que nous puissions accéder à cette société que nous souhaitons inclusive. La différence est un formidable atout pour le vivre-ensemble, pour notre société. Elle nous en apprend plus que nous ne pourrions l’imaginer sur l’autre et notre acceptation des différences, des “besoins spéciaux” comme les Anglo-Saxons pour parler des personnes handicapées. Mais cette idée nécessite des moyens conséquents que nous mettons progressivement en place.
L’accompagnement des personnes en situation de handicap est très largement assumé par des associations. Quel avenir et quelle place leur voyez-vous ?
C.J. : Je connais très bien le secteur par mon activité professionnelle antérieure. Les associations ont développé depuis des dizaines d’années une expertise unique sur laquelle nous devons nous appuyer, mais dans le même temps, le milieu dit ordinaire s’est progressivement desengagé de l’accueil de personnes en situation de handicap, en les confiant de façon trop systématique aux établissements et services médico-sociaux. Ces structures doivent désormais être davantage aux côté du milieu ordinaire, de l’école à l’entreprise en passant par les activités sportives ou artistiques, pour le rendre plus inclusif.
La France était justement pointée par un rapport de l’ONU comme “enfermant trop les personnes en situation de handicap en institution”.
C.J. : Comme pour tout changement, il faut l’opérer progressivement et, surtout, aux côtés des acteurs du secteur. Je ne milite pas pour une désinstitutionalisation radicale, mais pour une nouvelle étape pour la société et les personnes en situation de handicap avec une plus grande place des services à domicile qui permettent aux usagers de rester sur leur lieu de vie, de scolarité, de travail ou d’activité. Le médico-social, sans qui rien n’est possible, y a un rôle fondamental à jouer.
Pour vous, que représentent les PEP ?
C.J. : Les PEP représentent ce réseau d’acteurs indispensables, de professionnels aux convictions fortes et au dessein exigeant, humain et enrichissant qui est celui de garantir le bon déroulement de la vie des personnes en situation de handicap.